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adolphe brassard

gantes en crinoline et les élégants en pourpoint de velours ; qui a résonné de rires et de chansons, qui a vu la pavane et le menuet. Mais, maintenant, les parfums légers des bouquets de jadis sont échangés contre les odeurs pharmaceutiques ; sur les jolies consoles d’onyx et de marbre rose, la charpie et les cisailles nickelées remplacent les dés d’or et les étoffes soyeuses d’antan. Les bergères ne dansent plus sur les tapisseries aux cadres fleuris, et les socles sont vides de leurs fines statuettes et de leurs groupes élancés. L’atmosphère de gaieté et de plaisirs troublants d’autrefois s’est changée en une atmosphère de chagrins et de tristesse. C’est de ces salles dans lesquelles se multipliaient les baisemains et les révérences ; c’est de ce perron d’où s’offrait le coup d’étrier, que partent maintenant ceux que la convalescence renvoie dans leur famille, ceux que la guérison rejette dans les tranchées, ceux que la mort conduit dans les cimetières.