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les mémoires d’un soldat inconnu

lassais pas de l’entendre répéter que, la guerre finie, il serait ingénieur : qu’il ne lui restait qu’une année d’étude ; que ses parents avaient consenti de grands sacrifices pour lui permettre de suivre ses cours d’université. Il saurait les récompenser plus tard, et, en attendant, la gratitude était dans chacune de ses paroles. C’était une belle âme, un cœur noble, une intelligence méthodique. Il procédait à ses plans d’avenir dans une gradation logique, avec un enthousiasme communicatif que je partageais. J’émettais des opinions qu’il discutait avec sincérité. Je n’osais le distraire de ses plans d’avenir : il en vivait ; mais je trouvais téméraire de s’y attacher avec tant de force quand notre situation est si précaire.

Et maintenant, tous ces espoirs agonisent avec celui qui les a conçus. Il s’en rend compte et ne veut pas mourir. Il se pend à la vie et la supplie de ne pas le quitter. Il a mis en elle tant de confiance, qu’elle ne peut pas l’abandon-