Elles admirèrent un long moment silencieuses, puis, pour distraire son amie qu’elle voyait soucieuse, Béatrice prit une pose comique et déclama :
« Quel vacarme ! Les vagues de l’océan sont aux prises. Ne font-elles pas penser au combat de la vie ? C’est tout comme. Écoutez des cris, des vociférations, des menaces, des éclats de rire, des sanglots ; des murmures, des soupirs ; des supplications, des prières ; des chants de triomphe, d’amour et de haine… »
Elle s’arrêta pour reprendre haleine.
— Hein ?… crois-tu si je comprends bien le puissant langage de la mer…
Et se composant une voix sourde et frémissante, elle continua :
« Ce fracas sur la falaise ressemble à des coups de feu… »
Et d’un accent mourant :
« Des coups de feu… On en tire en signe de joie, on en tire pour tuer… »
— Ah… râla-t-elle.
Cette finale dramatique fut accueillie par une fusée de rire.
Béatrice sursauta.
— Milles excuses, mademoiselle, d’avoir dérangé votre improvisation, parvint à dire Étienne Bordier en se tenant les côtés.
— Vous en avez une façon d’apprécier l’art théâtral, vous autres. Voyons, Gilles, calme-toi. Allons, voilà Alix qui se met de la partie, alors moi aussi.
Et elle éclata de rire.