j’avais choisi pour mon voyage a refusé de me prendre à bord quand il a su le nom de la dame qui voulait faire route avec lui. Et lorsque Marcus a désiré en connaître le motif, le capitaine a répondu qu’il ne voulait pas avoir à bord une femme auteur, qui se moquerait de ses arrangements et pourrait le coucher dans son livre. Marcus se mit à rire, chercha à lui persuader de courir le risque de l’affaire, en l’assurant que je n’étais pas dangereuse ; mais cet homme a été inébranlable. Me voilà donc obligée d’attendre le bateau à vapeur, qui partira dans huit jours. Je suis redevable de ce contre-temps à madame Trollope et à Dickens. Mais je suis heureuse à Rose-Cottage avec mes excellents amis, et ce retard m’a procuré le plaisir d’assister à plusieurs leçons faites par Émerson ici et à New-York. Cette voix profonde et pleine produit une impression semblable à celle causée par la vue des perles et des diamants. C’est une fascination d’un genre tout particulier. Hier, j’ai entendu Émerson, dans une leçon sur « l’éloquence, » flageller sévèrement ses compatriotes à l’égard de l’exagération, de la boursouflure de leurs discours, comparées à la manière naturelle, poétiquement belle de l’Orient, qui agrandit les sentiments et les choses. Il a donné des échantillons de l’une et de l’autre manière, et l’auditoire, dans la meilleure intelligence avec le maître, a fait connaître vivement son approbation et le plaisir qu’il avait éprouvé.
Nous avons eu plusieurs belles et paisibles soirées (je n’accepte pas d’invitations, ne reçois de visites que par exception, — il faut que je me repose), durant lesquelles, mes amis et moi, nous avons lu et causé ensemble. J’ai lu