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DANS LE NOUVEAU-MONDE.

bien meilleure. Chez elle, et entourée des siens, elle était encore plus aimable qu’auparavant.

J’ai passé quelques jours fort agréables à Augusta, ne recevant des visites que le soir, et faisant le matin des excursions dans les plantations et autres lieux des environs. Ici, j’ai entendu et j’ai eu à répondre aux questions triviales et ennuyeuses ; l’une des pires et des plus habituelles est celle-ci : « Les États-Unis répondent-ils à votre attente ? » Mais j’ai aussi fait la connaissance de gens parfaits, hommes et femmes, véritables chrétiens et citoyens du Nouveau-Monde, qui travaillent en silence, avec sagesse et activité, à l’œuvre de l’émancipation, en aidant les esclaves à s’affranchir eux-mêmes, c’est-à-dire en leur fournissant l’occasion de gagner de l’argent, en les aidant à le faire fructifier, en les encourageant à travailler, à se bien conduire en vue de l’affranchissement, au bout d’un certain temps, de quelques années, et en leur accordant ensuite la liberté pour laquelle ils travaillent. L’un de ces amis de l’humanité ayant avancé un petit capital à une négresse, elle avait entrepris à son compte un travail qui lui permettait non-seulement de payer à son maître l’intérêt de la somme que son acquisition lui avait coûtée, mais encore elle était parvenue à racheter quatre de ses enfants ; restait le cinquième, et sous peu il allait être libre. Que te semble de cette femme esclave, qui ne craint pas de rester dans l’esclavage, pourvu qu’elle rachète ses enfants ? Au temps d’Athènes et de Sparte, une telle mère aurait été proclamée « un honneur pour l’humanité, » mais elle continue à être une esclave inconnue. Il est vrai qu’elle se trouve bien dans sa position et ne désire pas une liberté qu’elle ne pourrait pas acquérir à son âge sans changer une vie exempte de soucis contre une vie plus pénible, du