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III


Le voilà couché dans la rue,

Jô-Wenn, le noble et bon cheval !
Alentour la foule se rue,
Un amas stupide et brutal.

Le mors a déchiré sa bouche,
Le brancard écorché ses reins,
Plaie où vient bourdonner la mouche :
Les enfants arrachent ses crins.

Las ! Jô-Wenn, toi qui sur la lande,
Du point du jour à son déclin,
Tondais les pousses de lavande,
Près de ta mère heureux poulain !

Et quand Jobic, ton jeune garde,
Couché sur le palus fleuri,
Te jouait un air de bombarde,
Tu bondissais comme un cabri.
 
Mais passe, un jour, dans ce domaine
Un Normand, effroi des troupeaux,
Et jusqu’à Paris on t’emmène,

Paris, cet enfer des chevaux.