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QUATRIÈME PARTIE

francs-tireurs. Nous comprenions le sort qui nous était réservé. Mourir, pour mourir ! Il fallait tout risquer. Nous résolûmes de nous évader.

» Au fond de la cathédrale, il y a une petite porte basse donnant accès sur une grande place assez déserte une sentinelle montait sa fraction, se promenant d’un pas régulier de long en large ; elle était à son poste depuis peu, lorsqu’à une heure du matin environ, le premier prisonnier força la porte, sauta sur la sentinelle et la désarma ; pendant ce temps, à quatre nous nous sauvions

» Nous ne savons pas si les deux autres ont réussi à s’enfuir, je ne les ai jamais revus. Nous allâmes chacun de notre côté.

» Moi, je suis allé chez notre oncle Renaud, qui demeure toujours rue du Tabourg, dans la maison d’Agnès Sorel. Au milieu de la nuit je frappe à sa porte.

— Qui est là ? s’écria-t-il. Je lui dis mon prénom, il reconnut ma voix. Notre tante était épouvantée, elle avait une peur terrible que je restasse, les francs-tireurs étaient l’épouvante de la ville en raison des menaces de l’autorité prussienne, qui avait fait coller sur tous les murs de la ville des affiches ainsi libellées : « Quiconque recevra un franc-tireur sa maison sera incendiée ! »

» Ton oncle est à peu près de ma taille, comme tu le sais ; il me donna de ses habits. Après, que devenir ? Aller ailleurs ? il n’y fallait pas songer. Toute la ville avait des soldats à héberger. L’oncle