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CINQUIÈME PARTIE

pour nous rendre à Passy où notre bataillon était campé, mon mari était avec eux. Notre bateau venait de partir. Quelques-uns de nos amis se trouvant à Paris allèrent faire des emplettes. Ayant 15 minutes à attendre, je voulus rester sur le ponton jusqu’à leur retour. J’étais si fatiguée, il y avait si longtemps que je n’avais pris de repos que je me suis endormie.

Enfin un bruit se fit autour de moi, je me réveillai en sursaut, j’étais transie de froid. C’étaient les camarades qui venaient m’apprendre qu’il était inutile d’attendre plus longtemps, qu’on leur avait dit que le service des bateaux-mouches était interrompu. Ils me conseillèrent d’aller coucher chez moi ou chez ma mère, qu’eux s’arrangeraient. Le lendemain matin entre 4 et 5 heures on sonnerait le clairon au coin de la rue de Beaune, je les rejoindrais et ensemble nous retournerions à Passy.

J’avais eu froid, à dormir ainsi au bord de l’eau. Quelques instants après qu’ils m’eurent quittée, tout d’un coup j’entendis des rumeurs étranges, et je vis du côté d’Auteuil comme des lueurs d’incendie ; chancelante et émue je gagne l’Hôtel de Ville. Je m’adressai à la première personne venue pour avoir des renseignements. On me dit que le service des bateaux était interrompu, parce qu’il y avait du nouveau du côté d’Issy, et que les Versaillais étaient aux tranchées.

Nous avions eu si souvent de fausses paniques, que je ne pouvais y croire.

Enfin je résolus d’aller chez ma mère, rue de Beaune, elle m’apprit que depuis deux jours tout était bien