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CINQUIÈME PARTIE

Au Comité, personne ne crut à sa culpabilité. Il passa la nuit à l’Hôtel de Ville, fut mis en liberté dès l’aube. Il dit à Antoine Arnaud et à ceux du Comité : je vous ferai voir comment meurt un traître. Tous lui serrèrent la main bien affectueusement, et voulurent le persuader qu’ils ne croyaient pas qu’il fût un traître. Il partit. Nous devions le rejoindre au poste de combat de la rue Mirrah. Là, la lutte était ardente, terrible, paraît-il. À la hauteur du boulevard Magenta, nous vîmes un cortège. Des amis portaient à quatre, un brancard sur leurs épaules. C’était Dombrowsky qui était mortellement blessé. Ils firent halte. Dombrowsky nous serra la main et nous dit : « N’allez pas de ce côté, tout est fini ! vous seriez massacrés pour rien. Je vais mourir, mais ne cherchez pas à me venger, pensez à sauver la République. Les hommes ne comptent pas. » Il était fatigué. Il nous dit : « Adieu mes amis ! » On le conduisit à l’hôpital Lariboisière, où il expira deux heures après. Il s’était battu en désespéré, il eut deux chevaux tués sous lui, ses dernières paroles furent : « Voilà comment meurt un traître. »

Nous avons continué notre chemin, mais il était impossible d’aller plus loin que le boulevard extérieur.

Nous sommes allés jusqu’à la gare de Strasbourg, laquelle était occupée militairement par l’armée de Versailles, les soldats étaient armés, mais ils se tenaient dans l’intérieur. La place était absolument déserte. Nous décidâmes de retourner à l’Hôtel de Ville. Arrivée là, je suis allée trouver Delescluse, je lui ai dit ce