Page:Brongniart - Plans du Palais de la Bourse de Paris et du cimetière Mont-Louis.djvu/21

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

sur la vie de l’artiste auquel ils sont dus. Les détails de la vie privée d’un homme ne doivent être présentés au public, qu’autant que cet homme, par sa vaste renommée, appartient à l’Histoire, ou lorsque ses actions et ses paroles sont assez remarquables pour intéresser et pour servir d’exemple. Il seroit donc hors de toute convenance de donner sur M. Brongniart d’autres détails que ceux qui peuvent, se lier avec le caractère d’architecte en général, avec les dispositions naturelles qu’il suppose, et avec les jouissances et les privilèges qui semblent lui appartenir.

M. Brongniart[1], fils d’un pharmacien de Paris, avoit été destiné par son père à devenir médecin ; il avoit fait les études littéraires et commencé les études scientifiques propres à donner les connoissances nombreuses, et presque universelles, qui constituent l’art du médecin. Il avoit la grande mémoire, la justesse d’esprit et la finesse de tact qu’exige cette noble et difficile profession. Mais il falloit bien, ou qu’il eût quelques dispositions contraires à l’exercice de cet art, ou qu’il manquât de quelques-unes de celles qui lui sont nécessaires, puisque, malgré la direction de son éducation, malgré les facilités dont il jouissoit et les sociétés dont il étoit entouré, il se livra aux arts dès qu’il le put.

Si nous recherchons dans ses qualités et dans son caractère quelles peuvent avoir été les causes de cet éloignement, et celles de son goût et de son aptitude pour les arts, nous remarquerons, par exemple, que sa grande mémoire le servoit beaucoup mieux pour toutes les choses qui tiennent aux lettres et à l’imagination, c’est-à-dire, à l’harmonie des mots et à l’expression des sentiments et des passions, que pour celles qui se composent d’un grand nombre de noms et d’une longue série de faits. Il avoit donc la mémoire propre aux arts, et bien moins celle qui est nécessaire pour les sciences.

Une grande justesse d’esprit, cette qualité indispensable à tout, l’auroit mis dans le cas d’obtenir des succès dans les sciences, s’il eût voulu en suivre la carrière ; mais souvent les qualités qui font un artiste, sont incompatibles avec celles qui sont nécessaires à un savant. Il faut, par exemple, pour les sciences, une rare persévérance dans l’observation des moindres phénomènes. Or, ce calme de l’esprit, cette patience de caractère est presqu’en opposition avec cette espèce d’exagération dans les jugements, ces aperçus prompts, ces passages rapides d’une idée à une autre qu’exigent les arts d’imagination. M. Brongniart avoit donc dans l’esprit les premières qualités nécessaires à la culture des sciences ; mais

  1. Alexandre-Théodore Brongniart, né à Paris le 15 février 1739.