indispensable de dire quelque chose, je lui demandai si la porte qu’il avait derrière lui ne lui donnait pas trop de froid.
« Non, non, me répondit-il brièvement et presque brusquement.
— Eh bien, pensai-je, taisez-vous si vous le désirez. Je vais vous laisser à vos réflexions et reprendre mon livre. »
Je mouchai la chandelle, et je me remis à lire Marmion. Bientôt il se redressa ; ce mouvement me fit lever les yeux. Il tira simplement de sa poche un portefeuille en maroquin, y prit une lettre qu’il lut en silence, la replia, la remit à sa place, et tomba dans une profonde méditation. Je ne pouvais pas lire en ayant sous les yeux un visage aussi impossible à sonder ; dans mon impatience je ne pouvais pas me taire ; peut-être allait-il me mal recevoir, mais tant pis, il me fallait parler.
« Avez-vous reçu dernièrement des nouvelles de Marie et de Diana ? demandai-je.
— Non, pas depuis la lettre que je vous ai montrée il y a huit jours.
— Il n’y a rien de changé pour vous ? Vous ne quitterez pas l’Angleterre avant l’époque que vous m’avez indiquée ?
— Je le crains ; ce serait un trop grand bonheur pour que je puisse y compter. »
Arrivée là, je changeai le sujet de ma conversation. Je me mis à parler de mon école et de mes élèves.
« La mère de Marie Garrett est mieux, dis-je. Marie est revenue à l’école ce matin, et la semaine prochaine j’aurai quatre élèves nouvelles de Foundry-Close ; sans la neige, elles seraient venues aujourd’hui.
— En vérité ?
— M. Oliver paye la pension de deux d’entre elles.
— Ah !
— Il régalera toute l’école à Noël.
— Je le sais.
— Est-ce vous qui le lui avez conseillé ?
— Non.
— Qui est-ce donc ?
— Sa fille, je crois.
— C’est bien d’elle ; elle est si bonne !
— Oui. »
Une nouvelle pause. L’horloge sonna huit heures ; ce bruit le tira de sa méditation. Il décroisa ses jambes, se redressa et se tourna de mon côté.