Page:Bronte - Shirley et Agnes Grey.djvu/583

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quemment immuable. Aucun de mes muscles ne s’agita ; je regardai à peine la porte.

« Bonjour, oncle, dit-elle en s’adressant à ce personnage qui s’arrêta pétrifié sur le seuil.

— Il y a longtemps que vous êtes ici seule avec M. Moore ?

— Oui, très-longtemps ; nous sommes tous deux descendus de bonne heure ; il faisait à peine jour.

— Cette conduite n’est pas convenable…

— Elle ne l’a pas été d’abord : je me suis montrée de mauvaise humeur et peu polie ; mais vous pouvez voir que nous sommes maintenant les meilleurs amis du monde.

— J’en aperçois plus que vous ne voudriez que j’en aperçusse.

— Je ne crois pas, monsieur, dis-je ; nous ne déguisons rien. Permettez-moi de vous dire que toutes les observations que vous avez à faire, vous pouvez me les adresser. À partir de ce moment, je me place entre miss Keeldar et toute espèce d’ennui.

— Vous ! et qu’avez-vous donc à faire avec miss Keeldar ?

— La protéger, veiller sur elle, la servir.

— Vous, monsieur ? vous, le précepteur !

— Pas de paroles d’insulte, monsieur ! dit-elle ; pas d’expression méprisante envers M. Moore dans cette maison !

— Est-ce que vous prenez sa défense ?

— Sa défense ? oh ! oui. »

Elle se tourna vers moi avec un soudain et tendre mouvement, auquel je répondis en l’entourant de mon bras. Nous nous levâmes tous deux.

Good Ged[1] ! s’écria le personnage en robe de chambre qui frémissait à sa porte. Ged, je pense, est le nom d’un des lares de M. Sympson. Dans la détresse, il invoque toujours cette idole.

« Avancez, mon oncle, vous allez tout entendre : dites-lui tout, Louis.

— Je le défie de parler, le mendiant, le coquin, l’hypocrite, le vil, l’insinuant, l’infâme domestique ! Éloignez-vous de ma nièce, monsieur ; laissez-la aller ! »

Elle s’attacha à moi avec énergie, « Je suis près de mon futur mari, dit-elle ; qui osera le toucher en ma présence ?

  1. Pour Good God ! Bon Dieu !