Page:Brumoy - Le Théâtre des Grecs (1763) - Tome 1.djvu/332

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308 ŒDIPE.

Laïus, ah, Dieux, est-il homme plus malheureux & plus haï du Ciel que je le suis ? nul étranger, nul Thébain ne peut déformais me recevoir, ni me parler: je suis contraint de fuir loin de ces lieux, par qui ? par moi-même. Oui, c'est moi seul qui ai porté contre moi ce funeste arrêt. O comble d’horreur ! ô le plus abominable de tous les hommes, je souille la couche de celui-là même que j’ai cruellement massacré ! mais quoi, obligé de fuir, reverrai-je les miens ? retournerai-je à Corinthe ? je m’expose à épouser Mérope, à tuer Polybe, à porter mes mains criminelles sur ceux à qui je dois le jour. O fortune ennemie, ô destins impitoyables, peut-on ne vous pas imputer toutes ces horreurs ? ne souffrez pas, justes Dieux, que je voye jamais luire ce jour fatal: rayez-moi du nombre des humains avant que de marquer ma vie par ces exécrables traits.

Le chœur.

Sensibles à vos malheurs, Seigneur, nous vous conjurons de ne pas bannir la douce espérance jusqu’à ce que vous ayez vu le Berger.

Œdipe

Je l’attends. C’est l’unique espoir qui me reste.