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Paul n’avait que 11 ans. Vous devinez que le chagrin de monsieur Lapointe l’accabla moins que s’il eut été seul.

— Comme disait le père Chicoine, un sensible pourtant, les chrétiens auront le temps de pleurer au purgatoire. Ici-bas, on fait sa tâche.

Lorsque Paul eut 13 ans, il y eut un drame. Monsieur Lapointe voulait le faire entrer au collège et les pères dirent que Paul n’était pas prêt. Paul eut donc « un professeur privé, ce qu’il y a de mieux, quinze piastres par mois » et, à 14 ans, il fut encore refusé. L’année suivante, il passa deux semaines chez les pères, aussitôt chassé, et monsieur Lapointe crut toujours à une injustice, comme « pour le garçon des Soulière que le père Dumas reprit trois mois après ».

Monsieur Lapointe essaya de tout. Il se fit lui-même le professeur de Paul. Il piocha son latin. On le rencontrait qui déclinait rosa rosae. Il rêva aux brevets, il songea à faire passer un bill au Parlement, par son « confrère Benoît », quitte à entamer son petit capital, pour permettre à Paul d’accrocher un baccalauréat. Il épargnait, il ménageait. Le vendredi soir, il n’apportait plus son lunch au journal. Les âmes