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LA FOLLE EXPÉRIENCE

aux choses sexuelles sans honte, se bravant même, se forçant, pour s’enfoncer dans l’impureté, comme on se jette à l’eau.

Quand ils frappèrent à la maison close, Dufort eut un recul :

— Si on attendait un autre jour, on aurait peut-être de meilleures adresses…

Une négresse répondait, ouvrait la porte. Dufort dit encore à l’oreille de Philippe :

— J’ai peur… On peut se faire voler… On peut nous assassiner…

Les tentures sombres, les lumières voilées et un parfum trop fort avec un quelque chose de lourd les suffoquaient. La négresse les avait laissés seuls dans un petit salon, et ces deux solitaires n’étaient plus que deux enfants désespérés. Philippe songeait même à ces soirs de retenue, que craignait tellement son orgueil, au collège. Tous deux se levèrent, allant vers la porte :

— On va partir, ils ne s’en apercevront pas… Déjà les filles arrivaient, dans des accoutrements qui leur parurent grotesques. C’était comme une impudeur anachronique, des sortes de tutus de théâtre désuet. Et elles étaient fardées à donner mal au cœur.

Dufort, qui avait la vocation du nouveau riche, eut une inspiration :

— Je paie une danse, et une tournée de fort.

Le piano mécanique se mit à tourner des airs de danses criardes et, comme on servait des