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DE PHILIPPE

Son compagnon énumérait les richesses de l’abbé Lanctôt, il en faisait une sorte de millionnaire. Philippe en écrivait déjà la lettre de chantage qui lui apporterait la forte somme.

Cependant il revoyait le petit village de l’abbé Lanctôt, cet automne froid qu’il était allé chez lui, deux semaines, enfants tous deux. Dans les souvenirs de Philippe, il y avait des blancs-mangers très sucrés que Mme Lanctôt leur servait deux repas sur trois. Il y avait aussi une odeur de feuilles mortes qu’on faisait brûler près de la route, des grands ormes noirs dénudés qui balayaient un ciel lourd et fumeux, de la glace dans les fossés, et surtout un parfum de pain chaud qui sortait de la boulangerie proche. Il revoyait Robert Lanctôt qui ouvrait le salon toujours fermé où il avait montré à Philippe les poignées d’argent du cercueil de son grand-père.

Philippe ne voyait rien de commun entre ces scènes et le Lanctôt richard que lui proposait son compagnon. Ces souvenirs du passé émouvaient cependant Philippe, et il prit congé du parleur pour écrire tout de suite à Claire une description de son enfance.

Fatigué d’écrire, Philippe décida de se rendre tout de suite au magasin. Il mit la main dans sa poche, pour vérifier le contenu de son porte-monnaie, l’argent de Dufort : Philippe n’avait plus de porte-monnaie. Fébrilement, il chercha tout autour de lui, fit un bout de route, exami-