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Le pouvoir royal s’écroula, l’intérêt qu’on portait à la diffusion universelle de la langue n’en devint que plus grand. De bonne heure en effet les diverses Assemblées révolutionnaires, préoccupées de donner à la nation le moyen de suivre leurs débats, ne tardèrent pas à rechercher les mesures à prendre pour faire de l’unité de langue une réalité. Le 5, le 7, le 9 brumaire an II, sur la proposition de Romme, la Convention votait les décrets complémentaires de celui du 30 vendémiaire. L’article 6 disait en propres termes : « L’enseignement public est partout dirigé de manière qu’un de ses premiers bienfaits soit que la langue française devienne en peu de temps la langue familière de toutes les parties de la République. »

Bientôt après, le 8 pluviôse, sur un réquisitoire de Barrère, elle déclarait la guerre à tous les idiomes étrangers parlés sur le territoire. Le 6 et le 18 prairial de la même année, Grégoire reprenant une idée de Talleyrand, lui soumettait son plan d’anéantissement des patois, fondé sur l’idée que l’unité d’idiome était partie intégrante de la Révolution. Ces mesures, comme tant d’autres, ne furent pas suivies d’effet. Elles montrent du moins combien les Révolutionnaires sentirent nettement l’intérêt qu’il y avait à répandre partout la langue qui portait avec elle les idées modernes. C’est donc dans la plénitude d’un droit qu’il aurait pu affirmer avec plus de force que le gouvernement de la République a récem-

    françoyse, afin qu’elle y devienne aussi familière que l’allemande, et que par suite du temps elle puisse mesme, sinon abroger l’usage de cette dernière, du moins avoir la préférence des habitants du pays. » (Lettres, Instr. et Mém. de Colbert, publ. par P. Clément, V, 271).