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SAURIENS TERRESTRES GIGANTESQUES.

À mesure que la couronne s’usait ainsi de haut en bas, une absorption simultanée s’exerçait à la racine, causée par la pression d’une dent nouvelle qui naissait pour remplacer l’ancienne, jusqu’à ce que cette destruction, agissant d’une manière incessante aux deux extrémités, eût réduit la portion moyenne de l’ancienne à la condition d’un tronçon creux (fig. 11, 12) qui tombait de la mâchoire pour être bientôt remplacé[1]. À ce dernier état, la forme de l’organe avait entièrement changé ; sa couronne avait pris la forme aplatie de la couronne des incisives humaines ; elle ne pouvait plus s’acquitter que d’une mastication imparfaite, et elle était devenue presque inutile comme instrument tranchant.

Il n’existe pas, je crois, un autre exemple de dents aussi merveilleusement constituées comme instrumens mécaniques destinés à couper et à déchirer la substance végétale des plantes coriaces et résistantes ; et nous trouvons dans ce mécanisme animal des plus curieux une harmonie parfaite de toutes les

    dans leur action tranchante par la lame antérieure d’émail, et la disposition qu’affectait cette lame lui donnait encore une force nouvelle, et rendait son action plus complète. La face antérieure des dents est, en effet, parcourue, dans le sens de sa longueur, par des replis et des sillons alternatifs (pl. 24, fig. 2. 5, 6, 7, 8.) ; ces replis, qui formaient là comme des arcs-boutans, avaient pour but d’empêcher l’émail de s’écailler ; et le bord tranchant légèrement ondulé, qui résultait de l’alternance de ces replis et de ces sillons, constituait une suite de petites gouges, ou de petits ciseaux cannelés. Il résultait de là que les dents, sous l’action des mâchoires, constituaient un instrument d’un effet bien plus complet pour trancher les végétaux que si leur émail eût formé une seule ligne droite continue. Par suite de ces divers arrangemens, les dents demeuraient également propres à remplir leurs fonctions, dans toutes les phases qu’elles subissait ni depuis le moment où elles naissaient sous la forme d’une lancette aiguë (fig. 4), jusqu’à celui où leur usure était complète (fig. 10, 11).

  1. Une mâchoire d’iguane moderne que nous avons figurée pl. 24, fig. 15, offre le premier degré de cette opération ; et l’on y voit un certain nombre de dents nouvelles au moment où elles s’accroissent en