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EMPREINTES DE PIEDS.

rechercher avec le plus de chances de succès les espèces auxquelles ces empreintes doivent leur origine[1].

Que l’historien ou l’antiquaire aillent visiter les champs où se sont livrées les batailles des temps anciens ou des temps modernes ; qu’ils suivent pas à pas la marche de ces victorieux conquérans, dont les armées ont broyé les plus puissans royaumes ; le vent et la tempête ont effacé le sillon éphémère qu’y avait creusé leur passage, et les pieds de tant de millions d’hommes et de bêtes qui ont parcouru le monde en tous sens pour y semer la ruine et la désolation n’ont pu peser assez sur sa surface pour y laisser après eux une seule de leurs empreintes. Mais ces reptiles, qui se sont traînés sur la croûte encore ébauchée de notre planète aux âges de son enfance, y ont imprimé d’ineffaçables souvenirs de leur passage. Aucune histoire ne rappelle leur création, ni comment ils ont été enveloppés dans une destruction complète ; et l’on ne retrouve pas même leurs os parmi les débris fossiles qui nous sont restés de l’univers ancien. Des milliers d’années séparent le nous l’époque où ces traces ont été laissées par le pied des tortues sur les sables

  1. Ce mode de conclure d’après les traces des pieds est employé par l’homme dans tous les états de société où il se trouve. L’identité d’un malfaiteur est constatée sur l’empreinte qu’a laissée sa chaussure sur le terrain où il a commis son crime. Les traces de pieds humains que trouva le capitaine Parry sur les bords d’un ruisseau dans la baie de la Possession lui parurent tellement récentes, qu’au premier abord il pensa qu’elles avaient dû y être laissées depuis peu par quelque naturel du pays ; mais un examen plus attentif lui démontra bientôt que c’étaient les empreintes des souliers de quelqu’un de son équipage ; elles étaient là depuis quinze mois, et leur conservation était due à l’état de congélation du sol. Non seulement les sauvages de l’Amérique peuvent reconnaître un élan ou un bison d’après la trace de ses sabots, mais ils affirment même combien de temps s’est écoulé depuis son passage ; et l’Arabe, en voyant le sable où a posé le pied d’un chameau, dit si l’animal était pesamment chargé où s’il ne l’était que peu, s’il était estropié ou s’il avait l’usage complet de tous ses membres.