Page:Buffault - Étude sur la côte et les dunes du Médoc.djvu/115

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au contraire la stabilité des rives sablonneuses du Médoc de son temps, quand il écrit à Théon, habitant des environs de Soulac :

« Quid geris, extremis positus telluris in oris »
» Cultor arenarum vates ? cui littus arandum »
» Oceani finem juxta, solemque cadentem. »

Le même poète, s’adressant toujours à Théon, parie aussi du négoce considérable que son ami fait sur les côtes du Bas-Médoc.

Ammien Marcellin, contemporain d’Ausone (320-390), représente les côtes médocaines comme très accessibles et calmes de son temps, ce qui permettait au commerce de s’y faire en grand. « Aquitani, écrit-il, ad quorum littora ut proxima placidaque merces adventitiæ convehuntur, moribus ad molitiem lapsis in ditione venere Romanorum. »

Ces cultures, ce commerce n’auraient pu se faire, toute cette richesse et la mollesse des mœurs qui en était la conséquence n’auraient pu se produire, si les sables mouvants eussent alors existé.

Baurein prétend même qu’au ixe siècle les côtes du pays de Born n’étaient pas encore couvertes par les dunes, car les Normands y firent, à cette époque, une incursion et rapportèrent un riche butin ; s’il y avait eu des dunes, le pays ne pouvant plus faire de commerce, n’aurait pas été riche et les barbares n’y auraient pas abordé.

M. Delfortrie exagère, à notre avis, en ne faisant dater les dunes que du xvie siècle. C’est évidemment trop retardé. La vérité est qu’à cette époque seulement le phénomène commença à prendre de grandes proportions et à frapper les populations. On ne peut prendre pour un repère précis le depuis quelque temps de Montaigne.

Quant à Brémontier, qui fait remonter l’apparition des dunes juste au déluge, à la suite de calculs basés sur leur volume total et leur avancement annuel, sa conjecture, comme il dit d’ailleurs, se réfute d’elle-même.

Beaucoup d’auteurs semblent attribuer la formation des dunes modernes exclusivement aux défrichements, aux abus d’exploitation et de pâturage, aux incendies, et autres excès commis par l’homme dans les forêts qui s’étaient installées sur les anciennes dunes, excès qui rendirent leur mobilité à ces sables précédemment fixés (de Lapparent, J. Thoulet, etc.).

C’est ce qu’expose M. Élisée Reclus en ces termes :

« Il n’est pas douteux qu’avant le moyen-âge toutes les dunes du littoral étaient couvertes de bois. Dans les landes comme en Es- pagne le nom de Mont ou Montagne s’applique à la fois aux collines de sable et aux arbres qu’elles portent, on peut en conclure que toutes les hauteurs devenues mobiles plus tard, étaient jadis uniformément boisées et par conséquent non moins stables que les falaises des Pyrénées qui les continuent au sud. D’ailleurs, il reste encore sur les dunes quelques débris des anciennes forêts : non loin de