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être exploitées à blanc étoc en fin de période, sont peuplées de pins âgés de 50 ans ; ces arbres, malgré 4 années d’un gemmage intensif commencé en 1892 et 4 ou 5 quarres ayant enlevé presque toute l’écorce, sont aujourd’hui encore très vigoureux et ont la cime très verdoyante.

Par suite du ralentissement de croissance, les couches annuelles deviennent plus étroites, mais la proportion du bois de printemps, lâche et poreux, diminue, tandis que celle du bois d’automne, plus serré, augmente. Le grain du bois devient donc moins grossier et plus dur. En outre, le résinage détermine du centre à la circonférence du fût un courant de térébenthine qui imprègne l’aubier de résine et le rend de meilleure qualité et plus résistant à la corruption. De plus encore, la paroi de la quarre se lignifie, s’imprègne de résine et sur une certaine épaisseur devient semblable au bois de cœur. Le bois gemmé est donc plus résineux, plus lourd, plus dur, plus résistant, plus durable et d’un pouvoir calorique plus grand que le bois non gemmé. Ces avantages du bois gemmé, bien qu’affirmés par les habitants du pays, ont été contestés. Aussi l’Admon forestière fit-elle l’expérience en 1874 sur des planches de palissade de la côte du Flamand. On mit dans cette palissade des planches de 3 catégories : les unes tirées du pied des arbres gemmés, c’est-à-dire de la partie même où étaient ouvertes les quarres ; les autres tirées du haut du fût de ces arbres, c’est-a-dire de la partie supérieure aux quarres ; d’autres enfin extraites d’arbres non gemmés. Les premières planches durèrent 7 et 8 ans, les secondes 6 à 7 ans seulement et les troisièmes ne dépassèrent pas 6 ans. L’expérience a donc tourné tout à l’avantage du bois gemmé, comme c’était à prévoir. Elle a du reste été confirmée maintes fois, non plus officiellement, mais par la pratique, dans les constructions de maisons, de hangars, de bateaux, de clôtures. Quand, par exemple, on voudra pour tenir l’angle d’une clôture un solide piquet de pin, on le prendra dans le pied d’un arbre gemmé. Aujourd’hui l’Administration forestière exige toujours que les bois de pin qu’elle emploie comme matériaux proviennent d’arbres gemmés.

Mais, si le gemmage améliore ainsi le bois, il n’est pas sans inconvénients. Nous avons dit qu’il ralentit la croissance des arbres. De plus, bien que les ourles de bois nouveau qui encadrent la quarre arrivent, en se développant, à la recouvrir entièrement, il n’y a jamais adhérence entre ce bois nouveau et l’ancien qui forme le fond de la quarre. Par suite, lorsqu’on veut tirer du bois d’œuvre d’un pin gemmé, il faut que l’équarrissage enlève toutes les couches de bois formées par-dessus les premières quarres, ou bien la pièce, n’étant plus homogène, a une élasticité et une résistance bien moindre. C’est donc ou une diminution de volume, ou une dépréciation de qualité. Mais l’on ne peut dire, comme l’avance le Cours de Culture, que le tronc de l’arbre gemmé « devient tortueux la plupart du temps, et impropre, par conséquent, à tout usage de quelque importance. » (page 143).