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THÉORIE DE LA TERRE.

supposant même parfaitement régulière dans son origine, le mouvement des eaux, les feux souterrains, les vents, et les autres causes extérieures auroient nécessairement produit à la longue des irrégularités semblables à celles que nous voyons.

Les plus grandes inégalités sont les profondeurs de l’Océan, comparées à l’élévation des montagnes : cette profondeur de l’Océan est fort différente, même à de grandes distances des terres ; on prétend qu’il y a des endroits qui ont jusqu’à une lieue de profondeur : mais cela est rare, et les profondeurs les plus ordinaires sont depuis 60 jusqu’à 150 brasses. Les golfes et les parages voisins des côtes sont bien moins profonds, et les détroits sont ordinairement les endroits de la mer où l’eau a le moins de profondeur.

Pour sonder les profondeurs de la mer, on se sert ordinairement d’un morceau de plomb de 30 ou 40 livres, qu’on attache à une petite corde. Cette manière est fort bonne pour les profondeurs ordinaires : mais lorsqu’on veut sonder de grandes profondeurs, on peut tomber dans l’erreur, et ne pas trouver de fond où cependant il y en a, parce que la corde étant spécifiquement moins pesante que l’eau, il arrive, après qu’on en a beaucoup dévidé, que le volume de la sonde et celui de la corde ne pèsent plus qu’autant ou moins qu’un pareil volume d’eau : dès lors la sonde ne descend plus, et elle s’éloigne en ligne oblique, en se tenant toujours à la même hauteur : ainsi, pour sonder de grandes profondeurs, il faudroit une chaîne de fer ou d’autre matière plus pesante que l’eau. Il est assez probable que c’est faute d’avoir fait cette attention, que les navigateurs nous disent que