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par une série d’articles intitulés : « Barbarismes canadiens » ; Hubert LaRue aborda aussi la matière ; après lui, Tardivel, dans le petit opuscule menaçant d’excommunications « L’anglicisme, voilà l’ennemi » ; puis Oscar Dunn, dans son « Glossaire franco-canadien », publié en 1881 ; et enfin, il y a quatre ans, Fréchette, Lusignan et moi nous reprenions la lutte avec une ardeur furieuse, déterminés que nous étions à porter cette fois le coup de mort à ces choses informes, monstrueuses, innommables, qui ne sont ni des mots ni des expressions, ni des tournures ni des membres de phrase, et qui pullulent dans notre langage au point d’en faire disparaître toute structure.

Inutiles efforts ! Les canadiens sont incorrigibles. Ils ont une horreur pour ainsi dire instinctive du bon langage ordinaire : il leur faut ou parler horriblement mal ou bien poser pour « parler dans les tâârmes », ce qui fait qu’ils sont ou inintelligibles ou ridicules. Je ne parle pas ici, on le comprend aisément, de la classe des gens véritablement instruits, mais de ceux qui croient appartenir à cette classe, des gens de profession qui n’ont de profession que le nom et qui sont aussi ignorants que des charrues, qui introduisent les plus grotesques barbarismes dans le langage officiel ou judiciaire ; je parle surtout de ceux dont les contributions répétées et régulières à la masse de la publicité quotidienne apportent chaque jour une alluvion