Page:Buies - Chroniques, Tome 1, Humeurs et caprices, 1884.djvu/19

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n’y a rien à faire, que tout est inutile, qu’il n’y a pas d’opinion publique… ; nous négligeons les moyens grossiers, mais décisifs, et nous arrivons au parlement avec une phalange oppositionniste de dix ou douze membres, contre quarante ministériels.

Si vous voulez avoir une idée du génie politique de notre race et de l’intelligence que le peuple apporte en moyenne aux questions qui s’agitent autour de lui, retenez cette exclamation échappée à un brave homme discutant avec plusieurs autres sur les mérites et les torts respectifs du ministère. Je l’entendis par hasard, comme font toujours ceux qui prêtent attentivement l’oreille : « Quoi ! disait ce digne électeur, vous voulez que je sois en faveur d’un gouvernement qui nous a voté un nouveau péché ? — Un nouveau péché ! s’écrièrent tous ensemble les auditeurs ébahis. — Mais oui, un nouveau péché ; comme s’il n’y en avait pas assez déjà ! le gouvernement ne nous a-t-il pas voté la Calomnie anglaise ? »

Et voilà pourtant les hommes à qui l’on sacrifiera, pour avoir l’honneur de les représenter, sa santé, sa fortune, ses affaires, son repos, sa famille, tout, tout ce qu’on a de plus cher ! Idiots de candidats !

Québec-est est muet comme la tombe dont ses chantiers abandonnés, ses quartiers dépeuplés, ses industries éteintes, sont l’image désolante.

Quartiers dépeuplés ! oui, certes : il reste à peine quelques ouvriers pour des travaux de détail, là où retentissaient autrefois les mille haches des charpentiers