Page:Buies - Chroniques, Tome 1, Humeurs et caprices, 1884.djvu/440

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

présenter à la belle et charmante Mme Ross les hommages de tous les lecteurs du National, et je la prie d’accepter les miens comme les plus empressés, quoique peut-être les plus indignes de lui être offerts.

Après un déjeûner sous la tente dans lequel Horace, rendu subitement expansif et très vif dans ses allures, rivalisa d’appétit avec moi, nous engageâmes deux Indiens, nous nous couchâmes au fond d’un canot d’écorce et nous partîmes pour l’île d’Héléna située à trois lieues du poste. Trois heures après, en longeant toujours la côte nous arrivâmes à l’île. Il était temps ; j’étais à peu près rôti et Horace versait à grosses gouttes des sueurs philosophiques qui le détrempaient comme un navet dans la soupe.

Des bords du lac je ne puis dire grand’chose, si ce n’est qu’ils sont habités généralement du côté sud ; quant au lac lui-même, c’est une grande nappe d’eau d’environ cent vingt lieues en superficie [douze lieues de long sur dix de large], entourée d’un côté par une rive assez plate, assez monotone, et de l’autre par le pied des Périboncas, chaîne de montagnes qu’on aperçoit vaguement au nord et dont la silhouette bleue se mire avec éclat dans les eaux transparentes du lac.

Aussitôt arrivés sur l’île, nous en fîmes le tour c’était une marche de deux milles à peu près, pas davantage. Ici nous sommes en plein sur le domaine d’Horace ; l’île entière est à lui ; il a droit de haute et basse justice sur tous les veaux et dindons qui s’y trouvent : pas un moucheron qui ne lui paie tribut et ne fête l’arrivée