Page:Buies - Chroniques, Tome 1, Humeurs et caprices, 1884.djvu/92

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Vous voyez cela d’ici, — soixante baleines de cent pieds de long tuées en un seul jour par un seul homme ! Ce qui est certain, c’est que les premières barbes de baleine qui aient été vues en Angleterre provenaient du naufrage d’un navire basque en 1594, et, lorsqu’à la fin du seizième siècle, les Anglais équipèrent pour la première fois des baleiniers, ils furent obligés d’en appeler aux Basques pour les guider dans leurs préparatifs et pour remplir les fonctions les plus importantes du bord.

Depuis, quel changement ! c’en est au point que, loin d’avoir à courir au loin la baleine, c’est elle aujourd’hui qui vient nous trouver, comme celle qui est en ce moment à la Basse-Ville. Je ne dis pas qu’il faille absolument compter là-dessus pour abandonner la pêche dans les mers polaires ; mais enfin, c’est un progrès…

On ne vit jamais à Québec autant d’Américains et d’Américaines que cette année ; les portes étant démolies, l’étranger peut accourir. Aussi a-t-il pris possession de la ville désormais sans défense. Les hôteliers, les marchands de nouveautés et les cochers de fiacre font fortune.

Hier, je me suis trouvé ex abrupto avec un de ces fils de Washington qui, tous les soirs, inondent la plateforme avec leurs femmes et leurs filles. La conversation est vite engagée avec des Yankees, et elle roule sans délai sur des sujets sérieux et pratiques : « J’habite, me dit-il, un petit village du Vermont d’à peu près quinze cents âmes ; le maître de poste n’y a d’au-