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L’OUTAOUAIS SUPÉRIEUR

où naguère encore des solitudes impénétrables étaient couvertes de richesses forestières que l’on aurait crues inépuisables.

Tout le monde civilisé a fait cette funeste expérience, et l’exemple n’a pas touché l’Amérique, où elle se renouvelle en ce moment dans des proportions qu’elle n’a jamais atteintes nulle part ailleurs. Dieu sait les calamités que présage cette coupable imprévoyance, que les avertissements répétés depuis plusieurs années n’ont pas guérie, et il est grandement temps qu’on y songe. Mais ce n’est pas seulement en prévision des désastres causés par l’irruption des eaux se précipitant sans frein des montagnes dans les vallées, qu’il importe d’arrêter ce vandalisme destructeur ; les grands bois sont ici par eux-mêmes d’une nécessité absolue ; ils constituent un des éléments indispensables à l’accroissement rapide de la population de ce continent. Il n’y a pas de pays au monde où le bois joue un rôle aussi considérable dans le développement de la grandeur et de la puissance nationale. La preuve, c’est que la consommation des bois de charpente employés dans la construction des bâtiments et dans les mille usages de la vie ou de l’industrie, a augmenté de cinquante pour cent en dix ans, de 1870 à 1880… On ne se figure pas généralement sur quelle échelle s’accomplit cette dévastation, et on est disposé à sourire quand on