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« La plus grande partie des habitants », écrivait, en 1871, M. Adolphe Girard, missionnaire à l’Anse Saint-Jean, « n’ont pas même le nécessaire, surtout le printemps. Ces pauvres gens vivent au jour le jour, et ils n’ont pas d’épargnes pour le temps des semences. À cette époque il faut gagner le pain pour la famille, et la saison favorable s’écoule de la sorte sans que l’on puisse suffisamment ensemencer les terres. Ici, ce sont les familles privilégiées qui ont de la viande toute l’année. Cependant ces pauvres gens, et les enfants surtout, si mal nourris qu’ils soient, jouissent d’un embonpoint à faire pâlir les enfants des riches citadins.

Deux écoles, tenues sur un bon pied, fonctionnent ici ; elles sont fréquentées par 70 enfants environ. Elles sont sous le contrôle des commissaires. C’est au pauvre missionnaire qu’incombe la nécessité de faire les rapports au gouvernement et d’être secrétaire-trésorier. Quelle misère pour réunir l’argent nécessaire à soutenir ces écoles parmi des colons si pauvres, et dans un endroit où l’argent est si rare !… »

Et cependant on y réussissait, et la population allait toujours croissante et la production augmentait, comme on peut le voir par les statistiques suivantes qui se rapportent aux années 1871 et 1879 :

1871 1879
Population de la paroisse 495 720
Minots de blé récoltés 1,612 1,800
" d’avoine " 1,097 2,500
" d’orge " 1,961 1,450
" de patates " 3,998 6,000
Tonneaux de foin 220 5,600
Arpents de terre en culture 2,611 3,800

Nous allons interrompre ici la chronique annuelle de la Grande Baie, telle que nous venons de la faire, pour arriver sans plus de délai à l’état présent dont nous allons esquisser en quelques lignes la physionomie.