Page:Bulletin du Comité de l'Asie française, numéro 1, avril 1901.pdf/19

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
17
DE L’ASIE FRANÇAISE

triels et ingénieurs français, l’exploitation demeurant, l’ailleurs, soumise aux règles édictées par le Gouvernement impérial en ce qui concerne l’industrie nationale.

Il est convenu que les voies ferrées soit déjà existantes projetées en Annam pourront, après entente commune et dans des conditions à définir, être prolongées sur le territoire chinois.

Immédiatement après nous voulons nous prévaloir de cette faculté, mais nous voyons combien il est difficile avec des Chinois de réaliser cette entente commune et d’arrêter ces conditions à définir. Il faut un an de négociations laborieuses pour que nous obtenions pour la compagnie de Fives-Lille le droit de construire les 70 kilomètres de chemin de fer qui doivent réunir Lang-son à Long-tchéou. Et encore la compagnie française ne peut-elle se faire concéder cette ligne en toute propriété. Au lendemain de la conclusion de l’arrangement, M. Gérard, notre ministre à Pékin, écrit à M. Hanotaux : « La concession obtenue par la compagnie de Fives-Lille est une concession de construction et d’exploitation à forfait, au compte et aux risques et périls de la Chine, pendant une durée de trente-six ans, pouvant elle-même être prolongée et renouvelée. Ce n’est pas la concession absolue demandée dès l’abord comme prolongement en Chine de lignes de l’Annan, mais c’est du moins une concession accordant le raccordement des deux réseaux. » Un peu après, la France affirme encore sa politique dans le Sud, elle demande à la Chine « une déclaration qui nous garantisse contre la cession de Haï-nan et de la côte opposée » à une tierce puissance, et, le 15 mars 1897, le Tsong-Li-Yamen adresse à M. Gérard une lettre ainsi conçue :

Nous avons reçu la dépêche par laquelle vous nous dites que la France, étant données les relations étroites d’amitié et de bon voisinage qu’elle entretient avec la Chine, attache un prix particulier à ce que jamais l’ile de Haï-nan ne soit aliénée ni concédée par la Chine à aucune autre Puissance étrangère, à titre de cession définitive ou temporaire, ou à titre de station navale ou de dépôt de charbon.

Notre Yamen considère que Kiong tchéou (l’île de Haïnan) appartient au territoire de la Chine qui, de règle, y a son droit de souveraineté. Comment pourrait-elle la céder aux nations étrangères ? D’ailleurs, le fait n’existe nullement à présent qu’elle en ait fait le prêt temporaire aux nations étrangères. Il convient que nous répondions officiellement ainsi à Votre Excellence.

Comme on le voit, c’est là une réponse assez amphigourique. Elle est analogue à toutes les « déclarations d’inaliénabilité » faites par la Chine à diverses Puissances. Il n’y a rien là de la part du gouvernement chinois qui confère un droit à la Puissance qui a demandé la déclaration. Mais celle dernière n’en constitue pas moins l’affirmation parfaitement nette d’une politique et de prétentions à l’égard des tiers. Et ce n’est et seulement pour Haï-nan, mais encore pour les trois provinces limitrophes du Tonkin que nous avons demandé à la Chine des déclarations de ce genre.

Cependant, nous continuons à poursuivre le gouvernement céleste de nos demandes relatives aux pays du Sud. Nous devenons de plus en plus pressants parce que l’Angleterre a obtenu de la Chine une rectification de frontières du côté de la Birmanie, des promesses pour le raccord futur des chemins de fer de cette colonie avec ceux à construire dans le Yunnan, et, n peu plus tard, l’ouverture du Si-kiang au commerce étranger. Le 12 juin ! 897, le Yamen signe les trois formules suivantes pour « définir avec plus de précision et de netteté a mise à exécution de certaines clauses des conventions passées entre la Chine et la France ».

Le chemin de fer de Long-tchéou doit être prolongé, nos droits sur les mines des deux Kouang et du Yunnan sont précisés et on admet en principe la création d’un chemin de fer du Tonkin à Yunnan-fou :

Il est entendu que, conformément à l’article 5 de la Convention commerciale complémentaire du 20 juin 1895, ainsi qu’au contrat intervenu le 5 juin 1896 entre la compagnie de Fives-Lille et l’adminisistration officielle du chemin de fer de Dong-dang à Long-tchéou, et aux dépêches échangées les 2 et 25 juin de la même année entre notre Yamen et la Légation de la République, si la compagnie de Fives-Lille a convenablement réussi, et dès que la ligne de Dong-dang à Leng-tchéou sera achevée, on ne manquera pas de s’adresser à elle pour le prolongement de ladite ligne dans la direction de Nanning et Pésé.

Il est entendu que, conformément à l’article 5 de la Convention commerciale complémentaire du 20 juin 1895, dans les trois provinces limitrophes du Sud, Kouang-toung, Kouang-si et Yunnan, le gouvernement chinois fera appel, pour les mines exploiter, à l’aide d’ingénieurs et d’industriels français.

Il est entendu que la Chine entreprendra des travaux pour l’amélioration de la navigabilité du haut fleuve Rouge et qu'en vue des intérêts du commerce elle aplanira et amendera la route de Ho-kéou à Man-hao et Mong-tsé jusqu’à la capitale provinciale. Il est entendu, en outre, que faculté sera donnée d’établir une voie de communication ferrée entre la frontière de l’Annam et la capitale provinciale, soit par la région de la rivière de Pésé, soit par la région du haut fleuve Rouge ; les études et la mise à exécution par ia Chine devant avoir lieu graduellement.

Le 14 novembre 1897, les Allemands débarquaient à Kiao-tchéou, et cette usurpation entraînait toute une série de demandes de compensations de la part des Puissances. Les Russes s’installent définitivement à Port-Arthur, les Anglais prennent « à bail » Ouei-hai-ouei. Nous entrons les derniers en ligne et nous profitons des événements seulement pour préciser la politique que nous n’avons cessé de poursuivre dans le Sud. Nous y obtenons un dépôt de charbon et des engagements plus explicites de la part de la Chine en ce qui concerne le chemin de fer de Yunnan-fou dont il n’avait pas été parlé assez nettement, on en conviendra, dans les « formules » du 12 juin 1897.

Le 10 avril 1898, M. G. Dubail, chargé d’affaires de France à Pékin, se faisait adresser par le Tsong-Li-Yamen la note que voici :

Nous avons reçu de Votre Excellence la dépêche suivante :