Page:Bulteau - Les Pierres du chemin, chronique parue dans Le Figaro (Supplément littéraire) du 7 Juillet 1906.djvu/4

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persistent à commencer là leur jour de liberté. C’est comme s’ils venaient chercher leurs morts aimés pour les emmener à la campagne…

Le fracas de la ville s’est écarté. Chaque son se détache du silence comme une broderie qui brille : un cri d’oiseau, un arrosoir heurtant la pierre, un pas discret qui s’éloigne, une couronne fanée qui s’abat sourdement sur un tas de débris. Et le vent tiède court dans les feuilles, ploie une fleur, emporte un peu de parfum. Quelle douceur, quel apaisement ! L’immense nombre des morts rend au cœur la sérénité qu’avait troublée le petit nombre des vivants.

Soudain l’aspect du cimetière change : une automobile est entrée. Elle file, énorme, d’un rouge féroce, crachant sa grasse fumée sale sur les bouquets frais. Et c’est une chose étrange, laide, injurieuse, que cette voiture avec son odeur