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weimar

laquelle quarante. D’ailleurs, nos petites compatriotes ne tiennent pas tellement à paraître leur âge. L’aspect de la jeunesse ne nous semble précieux, dirait-on, que quand il commence d’être un mensonge. Les Français, d’intelligence et de sensibilité trop précoces, ne goûtent pas en tout abandon la merveilleuse griserie d’avoir vingt ans ; ils aspirent aux privilèges de la maturité : réussir, attirer l’attention, passer devant, régner. Ils sont déjà les hommes et les femmes qu’ils seront.

En Allemagne, la jeunesse est une heure détachée de toutes les autres, et qui a ses droits imprescriptibles. Heure libre et sacrée faite pour le jeu, le rêve et l’amour. Les robes blanches des petites excursionnistes plaisent, comme un symbole de cette halte magnifique et insoucieuse au seuil de la terrible vie. Enchantées par le clair dimanche, ces fillettes bruyantes ou pensives semblent porter l’uniforme du bonheur.

Et tout le monde autour d’elles a l’air joyeux, sans autre soin que de s’amuser. On se sent bien loin de l’Allemagne orgueilleuse, dure et menaçante. Mais de combien d’âmes, opposées par les instincts, les goûts, les besoins profonds, se compose l’âme de cette grande créature que nous appelons l’Allemagne ?…

Les douces impressions du chemin se perfectionnent lorsqu’on entre à Weimar. Point d’affreux