Page:Bulteau - Un voyage.pdf/175

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
160
un voyage

1860, d’aller elle–même à Rome défendre sa cause. Elle partit seule, triompha des derniers obstacles. Le mariage annulé, Liszt vint la rejoindre.

Ils tenaient leur rêve. Ils seraient liés par le seul lien qui manquât à leur grand amour. Et que ce fût dans la Ville Sainte que Dieu les donnât l’un à l’autre, cela ajoutait à leur joie, d’augustes impressions. Ils étaient heureux indiciblement.

Nul ne savait les raisons de leur présence à Rome. Ils voulaient demeurer seuls dans un si grave bonheur. Tout était prêt. La veille du jour choisi, ils avaient communié ensemble, et ils attendaient, le cœur suspendu. Déjà on avait paré de fleurs l’autel de San Carlo al Corso, où ils devaient s’unir. Lorsque, un cousin du prince de Wittgenstein tout récemment arrivé à Rome, passa là par hasard, vit ces préparatifs, s’informa, et apprit que la princesse devait le lendemain même épouser ce musicien. Aussitôt il court et remue la ville, obtient d’un grand personnage qu’il aille sur l’heure trouver le Pape, et lui représenter le scandale horrible d’un tel mariage…

Liszt et Mme de Wittgenstein avaient passé ensemble l’émouvante soirée, la dernière de leurs longues fiançailles ardentes. Il était tard. On annonça un visiteur. C’était un envoyé du Vatican. Il réclamait les pièces du procès dont la revision venait d’être décidée par le Pape, et, au nom du Pape, il ordonnait de remettre le mariage.

La princesse fut atteinte profondément par un coup si étrange. Elle crut sentir la volonté divine