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dresde

l’odeur chaude du sang ? et tant de turquoises, ce sont des regards peut-être ? Le prince demeure éperdu au milieu de l’impossible trésor… Ainsi est-on dans ce fol endroit merveilleux : la voûte verte.

La décoration seule des pièces suffirait à l’enchantement : l’une vert et or où sont les bijoux ; d’autres rouges et or : et toutes sont ornées avec un goût si joyeux, si vif, tant de grâce et de folle fantaisie ! Des coupes et des vases posent sur des consoles dont les formes capricieuses font penser à ces longues plantes, nées dans le sable des rivières et que, sans cesse, l’eau tourmente, courbe et recourbe en volutes, en arabesques molles. Des pilastres dorés, repercés, des lambrequins, des baldaquins, des bêtes, griffons, dragons, qui se tordent, s’aplatissent, élancés ou tapis, et des nègres grimaçants, des singes qui portent une tablette, ou grimpent à quelque liane, animant les murs d’une vie fantastique. Et ailleurs, des glaces peintes de rouge et d’or, des marbres de couleur harmonisés comme les broderies d’une merveilleuse étoffe composent pour les yeux un plaisir riche, varié. Mais on oublie vite ce décor…

La lumière rampante et qui semble elle aussi dessiner des arabesques atteint des milliers de choses qui appellent le regard et l’affolent. Ce n’est plus la lumière froide qui coule insoucieuse aux panses des grands vases chinois ou saxons. C’est une lumière ardente, elle attaque les matières précieuses avec une sorte de violence passionnée. Tout