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dresde

raient sur un mot d’esprit. Qui sait s’ils n’avaient pas choisi la meilleure part ?…

La petite âme folle de plaisir qui hante l’église blanche est bavarde et persuasive…

La messe finie, une foule de gens se précipitent pour féliciter le maître de chapelle. Ils l’arrêtent et le retiennent. Les marches qui descendent de la tribune font l’office du foyer où l’on congratule les artistes après le concert. C’était bien un concert, une fête mondaine, cette messe.

Mais, au moment de sortir, je vois près de la porte une paysanne à genoux. Vêtue d’un costume bizarre, sombre et de style ancien, elle est là les bras en croix, la tête renversée, les yeux perdus et tristes. Elle ne sent pas qu’on la frôle. Les bras étendus comme étaient les bras cloués du Sauveur pendant son agonie, immobile en une rêverie douloureuse, elle implore. Et dans l’église faite et ornée de telle sorte, que les princes de Saxe ne s’ennuyassent pas à la messe, la disparate de cette extase vous rappelle — un moment on l’avait oublié — que la douleur est bien plus belle que le plaisir.

L’Opéra de Dresde, bâti au milieu du xixe siècle sur les plans de Semper, reproduit quant à l’extérieur le style de la seconde Renaissance. La salle, charmante, claire, commode, aérée, est une salle moderne. Mais on ne sait rien de tout cela lorsqu’on