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un voyage

nissait les petits enfants de la ville pour leur distribuer des fruits et des gâteaux.

Cet empereur avait de la gentillesse. D’ailleurs c’était un drôle d’homme. Très beau, très content de sa figure et de son air, il s’intéressait à une foule de choses : l’alchimie d’abord, puis la botanique et le jardinage. Pour la politique et le gouvernement de l’empire, il n’en absorbait pas la dose qui lui eût donné de l’ennui. Et, du reste, pour l’empire, il s’en moquait bien. Mathias Corvin prenait la Moravie, la Silésie ; lui, il plantait des arbres. Corvin menaçant Vienne, pour ne pas être pris Frédéric s’en était allé lestement, Et comme les Viennois le suppliaient de revenir à leur secours, il répondait avec gaîté : « Tant pis pour eux ! ils n’ont pas été contents de mon gouvernement, ils auront maintenant une cigogne pour roi. » Ainsi, adaptait-il Esope. Si les destinées de l’empire le laissaient froid, il aimait sa maison, ce duc d’Autriche. Et il affirma son amour dans une devise qu’il prit : Austriæ est imperium orbis universi. Il faisait graver les initiales de ces orgueilleuses paroles : a, e, i, o, u, sur sa vaisselle, ses livres, ses châteaux, ses pierreries même, et sur sa tombe ; ensuite il avait l’esprit en repos.

Un jour qu’il ne trouvait rien à faire, il fonda un ordre : l’ordre de la Sobriété. Et puis, il voyageait. Les cinquante années de son règne, il en passa vingt-cinq hors de l’empire, et les, vingt-cinq autres sur les routes d’Allemagne. Il allait de-ci, de-là sans trop savoir pourquoi, pour circuler : — comme ce