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l’ombrie

et les réponses à de secrètes questions qui les tourmentent. D’autres — nombre d’Anglais et d’Anglaises — étudient la peinture ombrienne avec un intérêt passionné ! Tous sont sérieux, pleins de respect, disciplinés par l’atmosphère religieuse de la région.

Les peintres ombriens l’ont tous subie, cette atmosphère. Beaucoup de leurs tableaux, on les dirait peints à l’ombre fraîche des cloîtres. C’est la même patience, le même soin, la même délicatesse qu’avaient les enlumineurs de livres saints. Point de personnages à durs tendons d’athlètes, comme chez Mantegna ; de géants membrus, écrasés par leur propre force comme chez Michel-Ange. Point d’expressions violentes, de brusques gestes. Ils ne nous montrent pas la bonhomie réaliste de Carpaccio, ni le charme tendrement voluptueux de Bellini. Ils sont ensemble un peu secs et très doux. Leur grâce pliante a je ne sais quelle délicieuse faiblesse féminine.

Voyez par exemple, dans les tableaux de Fiorenzo di Lorenzo, au musée de Pérouse, ces jeunes hommes si bien faits, si bien habillés. Les maillots étroits dessinent à merveille leurs élégantes formes, leurs vestes tuyautées s’évasent drôlement sous leurs tailles de demoiselles. Ils cambrent les reins, montrent avec un plaisir évident de si beaux costumes, et surtout de si belles jambes, et ces cous ronds et blancs, ces longs cheveux savamment coiffés. Ils sont contents d’être jolis — contents comme des femmes. Sur leurs fins petits visages, l’expres-