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un voyage

lorsqu’on baise la main du lépreux ; lorsque, sans moins aimer, on accepte que l’outrage réponde à votre amour ; lorsque le pain qu’on mange, et le soleil levant, on les regarde comme des dons exquis auxquels on n’avait pas droit, car on n’a droit à rien.

Quand il a trouvé son secret de bonheur, François rebâtit les chapelles en ruines, car le travail est saint ; soigne les malades et console tout ce qui souffre, parce que l’amour veut être employé. Il ne possède plus aucune chose. Il est heureux. Sa famille le tourmente, le renie. Mais il prend un vieux pauvre : « Tu seras mon père. Et quand je te dirai : mon père, bénis-moi, tu me béniras. » Il est hâve, haillonneux, ses yeux brillent de fièvre, les enfants lui jettent des pierres en criant : « Au fou ! » Les gens le méprisent et rient. Bientôt ils ne riront plus. Il se met à prêcher. Sa parole entre dans les cœurs comme une épée. On l’écoute : il apporte la joie.

Ce sont pour l’Italie de rudes temps, ces temps-là. Famines, pestes, guerres continuelles ; le travail menacé sans trêve, et cette atmosphère de haines : haines de ville à ville, de famille à famille, de voisin à voisin. Et les cruautés atroces des soldats, et l’atroce justice des princes. Les pauvres âmes peureuses regardent vers le ciel. Le pape en tient les clefs, il excommunie – damne — à son plaisir. Autour de lui sont les prélats : « de pierre