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amsterdam

tion de la variété qui est le goût suprême de la vie, cette fatigue inquiète qui pousse ailleurs, et toujours, notre espoir, comment ne l’éprouverait-on pas ici, redoublée ? Voyez cette jeune demoiselle qui se sait jolie, et coule un regard malicieux de petite citadine renseignée ; cette demoiselle, aux cheveux jaunes et brillants comme la paille, elle a le matin ajusté aussi soigneusement son costume national qu’aurait pu faire une vendeuse d’Exposition universelle. Il faut plaire aux « gens du bateau ». Et elle tend sa corbeille de raisins mûris à la chaleur du charbon.

Derrière elle c’est l’île de Marken, plaquée çà et là de maisonnettes peinturlurées, l’île nue, sèche, où pas un arbre ne pousse, pas une plante, sinon ces herbes grises nourries de sel mordant, nées du sable et pâles comme ce sable que, pendant les siècles, a broyé l’immense mer sans repos…

La demoiselle de Marken sourit et offre ses raisins belges.

Certains endroits font partie de la sensibilité un peu à la manière de ces maîtres chers ou de ces amis dont, aux heures d’enfance, les sentant supérieurs et magnifiques, on a subi la direction avec une joie passionnée. Les paroles qu’ils ont dites, on les entend toujours ; leur mémoire vous dirige, on garde d’eux une pénétrante nostalgie. Le musée d’Amsterdam est pour moi un de ces endroits. Je