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LA DÉCOUVERTE DU MONDE ET DE L’HOMME


qu’il en soit, c’est chez les Italiens que cette fusion a eu lieu d’abord. Déjà ils avaient concouru aux croisades avec des idées différentes de celles des autres peuples, parce qu’ils avaient déjà des flottes et des intérêts commerciaux dans l’Orient ; de tout temps les habitants des côtes de la Méditerranée avaient eu d’autres instincts que ceux de l’intérieur des terres, de tout temps les ltaliens avaient été impropres à devenir des aventuriers à l’instar de ceux du Nord. Lorsqu’ils se furent établis à demeure dans tous les ports orientaux de la Méditerranée, les plus entreprenants d’entre eux prirent naturellement le goût des grands voyages qui entraînait la race mahométane ; ils trouvaient en quelque sorte devant eux une grande partie de la terre déjà découverte par d’autres. Quelques-uns, comme les Polo de Venise, furent emportés par le tourbillon de la vie mongole et arrivèrent ainsi jusqu’aux marches du trône du Grand Khan. Dans l’océan Atlantique nous rencontrons de bonne heure des Italiens qui prennent part à des découvertes ; ce sont, par exemple, des Génois qui trouvent les îles Canaries dès le treizième siècle [1] ; en 1291, l’année même où fut perdue Ptolémaïs, le dernier reste des possessions chrétiennes en Orient, ce sont encore des Génois qui les premiers essayent de retrouver la route maritime des Indes orientales [2] ; Colomb n’est que le plus grand de toute une série d’Italiens qui se mettent au service des peuples de l’Occident et qui explorent les mers lointaines.

  1. Luigi Bossi, Vita di Cristoforo Colombo, où se trouve une récapitulation des voyages et des découvertes antérieurs des Italiens, p. 91 ss.
  2. Voir sur ce sujet une dissertation de Pertz. On trouve aussi des renseignements, malheureusement incomplets, dans Sylvius Ænéas, Europœ Status sub Frederico III. lmp. cap. xliv. (Ent. aut. dans les Scriptores de Freher, édit. de 1624, t. Il, p. 87.) (Sur E. voir S. Peschel, p. 217 ss.)