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empédocle d’agrigente

pensées ! Ils ne voient qu’une faible mesure d’une vie qui n’est pas une vie[1], et, condamnés à une prompte mort, ils sont enlevés et se dissipent comme une fumée. Chacun d’eux est instruit de cela seulement qu’il a rencontré par hasard au gré de ses errements, et il ne se vante pas moins dans sa frivolité de connaître le tout. Tant il est difficile que ces choses soient vues par les yeux ou entendues par les oreilles des hommes, ou saisies par leur esprit. Toi donc[2], puisque tu as trouvé ton chemin jusqu’ici, tu apprendras, mais non plus que l’esprit mortel ne possède de force. — R. P. 163.

3. …à garder dans ton cœur muet.

4. Mais, ô dieux, détournez de ma langue la folie de ces hommes[3]. Sanctifiez mes lèvres et faites couler d’elles un fleuve pur ! Et toi, très courtisée Muse, vierge aux bras blancs, je te supplie de me faire entendre ce qui convient aux enfants d’un jour ! Fais-moi avancer dans ma voie dès la demeure de la Sainteté et pousse mon char docile ! Des couronnes de gloire et d’honneur de la main des mortels ne te forceront pas à les soulever du sol, afin que, dans ta fierté, tu parles au-delà de ce qui est équitable et droit et que tu gagnes ainsi un siège sur les hauteurs de la sagesse.

Commence maintenant, considère de toutes tes forces de quelle manière chaque chose est claire. N’accorde pas à ta vue un trop grand crédit en comparaison de ton oreille, et n’estime pas ton oreille qui résonne au-dessus des claires instructions de ta langue[4] ; et ne refuse ta confiance à aucune des autres parties de ton corps par lesquelles il y a un accès à l’intelligence[5] ; mais considère toute chose de la manière qu’elle est claire. — R. P. 163.

5. Mais c’est toujours le fait des esprits bas de ne pas croire ceux qui valent mieux qu’eux. Apprends, toi, comme te l’ordonnent

  1. Les mss de Sextus ont ζωῆσι βίου. Diels lit ζωῆς ἰδίου. Je préfère toujours lire avec Scaliger : ζωῆς ἀβίου. Cf. frg. 15 : τὸ δὴ βίοτον ϰαλέουσι.
  2. La personne apostrophée ici est toujours Pausanias, et celle qui parle Empédocle. Cf. frg. 111.
  3. En première ligne sans doute de Parménide.
  4. Il s’agit ici du sens du goût, non de la parole.
  5. Dans ses premières éditions, Zeller plaçait le point après νοῆσαι, ce qui donnait à peu près le sens opposé : « Refuse toute confiance aux sens du corps ; » mais il admet dans sa 5e (p. 804, n. 2), que le contexte est en faveur de Stein, qui ne met qu’une virgule après νοῆσαι, et joint ἄλλων avec γυίων. Ainsi aussi Diels. La paraphrase donnée par Sextus (R. P. ib.) est substantiellement exacte.