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INTRODUCTION À L’HISTOIRE

semblables aux sommets des montagnes, décorés de parasols et d’étendards élevés, et ornés de diverses pierres précieuses ; et j’ai multiplié les vases qui renferment ses reliques. Femmes, enfants, maisons, moi-même, ainsi que la possession de la terre et de mes trésors, il n’est rien à quoi je n’aie renoncé sous l’enseignement du roi de la Loi. Bien, bien, reprit le Sthavira Upagupta ; tu as bien fait, grand roi, d’exécuter les ordres du Buddha. Celui qui emploie son corps au profit de ce qui est réellement essentiel, et qui se sert des objets matériels pour soutenir sa vie, ne se lamentera pas quand son temps sera venu, et il ira dans la demeure désirée des Dieux.

Le roi ayant alors introduit en grande pompe le Sthavira Upagupta dans sa demeure royale, le prit entre ses bras, et le fit asseoir sur le siége qui lui était destiné.

Le corps du Sthavira Upagupta était poli et parfaitement doux, aussi doux qu’un flocon de coton. Le roi s’en étant aperçu, lui dit les mains réunies en signe de respect : Noble créature, tes membres sont doux comme le coton, doux comme la soie de Bénarès ; mais moi, être infortuné, mes membres sont rudes, et mon corps est âpre au toucher. Le Sthavira répondit : C’est que j’ai fait à l’Être sans pareil un don précieux, un présent incomparable ; je n’ai pas fait au Tathâgata le don d’une simple poignée de terre, ainsi que tu l’as fait jadis. Ô Sthavira, reprit le roi, c’est parce que j’étais enfant que jadis, ayant rencontré un personnage sans égal, je lui ai donné une poignée de terre, action dont je recueille aujourd’hui le fruit. Alors le Sthavira voulant rendre la joie au cœur d’Açôka, lui répondit en ces termes : Grand roi, vois l’excellence du sol dans lequel tu as semé cette poussière ; c’est à elle que tu dois l’éclat du trône et la puissance suprême. À ces mots le roi, ouvrant les yeux d’étonnement, appela ses ministres et leur dit : J’ai obtenu l’empire d’un Balatchakravartin, uniquement pour avoir donné une poignée de terre : que d’efforts ne devez-vous donc pas faire, seigneurs, pour honorer Bhagavat ? Puis tombant aux pieds du Sthavira Upagupta, il s’écria : Voici, ô Sthavira, quel est mon désir : je veux honorer tous les lieux où a séjourné le bienheureux Buddha ; je veux les marquer d’un signe en faveur de la dernière postérité. Et il prononça la stance suivante :

Tous les endroits où a séjourné le bienheureux Buddha, je veux aller les honorer et les marquer d’un signe en faveur de la dernière postérité.

Bien, bien, ô grand roi, reprit le Sthavira ; c’est une belle pensée que la tienne. Je vais te montrer aujourd’hui les endroits où a séjourné le bienheureux Buddha ; je les honorerai les mains jointes, j’irai les visiter, et je les marquerai d’un signe, n’en doute pas[1].

  1. Ces dernières paroles doivent sans doute être mises dans la bouche du roi ; cependant nos manuscrits ne l’indiquent pas ainsi.