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DU BUDDHISME INDIEN.

cet anachorète, s’écria Vîtâçôka, ne peut par cette rude pénitence dompter la passion, que sera-ce des Çramanas, fils de Çâkya, qui recherchent les tapis et les siéges bien étendus ? Comment pourront-ils triompher de la passion ? Et il prononça cette stance :

Si les Rĭchis habitants de cette forêt déserte, qui ne se nourrissent que d’air, que d’eau et que de racines, ne peuvent, par d’aussi rudes austérités pratiquées pendant un temps si long, parvenir à maîtriser leurs désirs,

Comment les Câkyas pourraient-ils se rendre maîtres de leurs sens, eux qui mangent une si grande quantité de viande, et de riz bien assaisonné de lait caillé et de beurre ? Si cela était possible, le mont Vindhya serait capable de traverser l’Océan.

Oui, le roi Açôka est complètement la dupe des Çramanas, fils de Çâkya, auxquels il témoigne du respect.

Açôka entendit ces paroles ; et comme son esprit était fécond en expédients, il dit à ses ministres : Vîtâçôka n’a de bienveillance que pour les Tîrthyas ; il faut que par adresse je lui fasse concevoir de semblables sentiments pour la Loi de Bhagavat. Que commande le roi ? répondirent les ministres. Lorsque je serai entré dans la salle de bain, dit le roi, après avoir quitté ma coiffure et le bandeau, symboles de la royauté, il faudra que, par un moyen quelconque, vous attachiez la coiffure et le bandeau royal à Vîtâçôka, et que vous le fassiez asseoir sur le trône. Il sera fait ainsi, répondirent les ministres. Le roi ayant quitté sa coiffure et le bandeau, symboles de la royauté, entra dans la salle de bain. Les ministres dirent alors à Vîtâçôka : Quand le roi Açôka sera mort, c’est toi qui seras roi ; revêts donc, en attendant, ces ornements royaux ; nous allons t’attacher la coiffure et le bandeau royal, et te faire asseoir sur le trône ; nous verrons si ces ornements te vont bien ou mal. En conséquence, les ministres parèrent Vîtâçôka des marques de la dignité royale, et le placèrent sur le trône ; puis ils en donnèrent aussitôt avis au roi. Celui-ci voyant Vîtâçôka paré de la coiffure et du bandeau, symboles de la royauté, et assis sur le trône, s’écria : Je vis cependant encore, et toi tu fais déjà le roi ! Holà ! quelqu’un. Au même instant parurent les exécuteurs couverts de vêtements bleus, ayant les cheveux longs et portant à la main une cloche ; et se prosternant aux pieds du roi, ils lui dirent : Qu’ordonne le roi ? Je vous abandonne Vîtâçôka, répondit-il. Alors s’adressant au prince, les exécuteurs lui dirent : Nous les exécuteurs armés du glaive, nous nous emparons de ta personne. Mais les ministres se jetèrent aux pieds d’Açôka en le suppliant : Pardonne, ô roi ! Vîtâçôka est ton frère. Je lui pardonne, répondit Açôka, mais pour sept jours seulement ; c’est mon frère, et en