Page:Burnouf - La Science des religions.djvu/159

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des doctrines. Il est donc impossible qu’une grande lumière ne sorte pas de l’étude des hymnes du Vêda, pris comme centre de toutes les recherches relatives à l’histoire des religions âryennes.

Mais là linguistique et l’histoire appliquées aux choses religieuses, c’est-à-dire l’archéologie sacrée, sont des méthodes anatomiques, méthodes d’analyse et tout au plus de comparaison. Cette analyse se préoccupe beaucoup des formes et très-peu de la signification des mots.

Or, les religions sont des organismes vivants. S’il en était autrement, il faudrait admettre sans restriction la célèbre formule nomina numina, et regarder les conceptions religieuses comme des jeux de mots. Il deviendrait alors inexplicable que des peuples entiers et souvent plusieurs peuples, les uns à la suite des autres, aient adopté de pareilles inanités pour en faire les objets de leur culte, fondé leurs plus grandes institutions sur des illusions pures et encensé des mots. La religion est un acte d’adoration, et l’adoration est à la fois un acte intellectuel par lequel l’homme reconnaît une puissance supérieure, et un acte d’amour par lequel il s’adresse à sa bonté. Ces actes ne sont point des abstractions et ne peuvent s’expliquer par des abstractions scientifiques. Ce sont des réalités, où l’homme est acteur depuis les temps les plus anciens ; ce sont des œuvres qu’il n’a cessé d’accomplir aux époques de haute civilisation comme aux époques de barbarie ou de décadence. Il faut donc admettre, à moins d’accuser d’insigne folie le genre humain tout entier, que les formules sacrées, ainsi que les rites et les symboles, couvrent quelque chose de réel, de vivant et de permanent, qui donne à toutes les religions leur durée et leur efficacité. Cet élément doit jouer dans leur longue et multiple histoire le même rôle que la vie dans les corps