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à peine intelligibles, et dont la connaissance répand sur elles une lumière inattendue.

Il est une plante dont les sucs se nourrissent de la rosée des nuits sous les rayons de la lune, et qui, mûrie par le soleil dont elle concentre les feux, fournit aux hommes un jus savoureux, d’abord sucré, puis clarifié par la fermentation et enfin rempli d’une matière ignée, combustible, d’un véritable esprit de vie. Consumé par le feu, il lui donne une ardeur et des flammes étonnantes ; consommé par l’homme, il rend son âme ardente et remplit son corps d’une vigueur nouvelle. Cette plante a varié selon les latitudes : dans l’Inde, c’est une asclépiade, que l’on nomme soma ; dans l’Asie centrale, chez les Médo-Perses, elle porte le nom identique de haoma ; dans l’Occident, c’est la vigne. Donné aux hommes par une grâce divine, cet arbuste a été apporté par un oiseau céleste nommé çyêna, l’épervier ; et c’est dans un de ses rameaux que, d’un vol rapide, il a fait descendre sur terre le feu d’en haut.

Le jus de ces plantes est devenu la liqueur sacrée chez tous les peuples âryens. Agni réside en elle ; il y est présent, quoique invisible : c’est ce qu’affirment mainte fois les poètes vêdiques, comme un dogme reconnu de leur temps. Le vase qui la contient contient donc aussi Agni sous une forme mystique, et puisque Agni en peut sortir sous la figure mouvante du feu, ce vase contient encore la mère d’Agni, la divine Mâyâ. C’est le calice qui renferme le sang de la victime immolée.

D’un autre côté, si la liqueur sacrée est prise pour l’emblème des aliments liquides dans toute la nature, l’aliment solide est représenté par le gâteau, qui dans l’Inde védique est composé de farine et de beurre, matières éminemment combustibles et nutritives. Agni est donc aussi présent dans l’offrande solide. C’est ce dont les auteurs du Vêda ne font aucun doute.