Page:Burnouf - La Science des religions.djvu/259

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d’expansion dont elle est douée. Quand le bouddhisme comprit la peine qu’il aurait à vaincre dans la vallée du Gange, où il était né, ses missionnaires se répandirent au dehors dans toutes les directions et allèrent fonder des centres d’orthodoxie au Népâl, au Tibet, à Samarcande, en Chine, à Siam, à Ceylan et dans plusieurs autres pays. Leurs églises ne conquirent point ces contrées sans coup férir, malgré la charité qui les animait ; mais comme aucun système orthodoxe de quelque valeur n’existait dans ces sociétés, le bouddhisme mit peu de temps à les dominer.

Il en fut de même en Occident pour le christianisme, arrivant dans la Grèce et dans Rome en pleine civilisation, mais n’ayant devant lui qu’un polythéisme en décadence et sans cohésion. Il n’eut peut-être pas besoin, dans l’orient de l’Europe, d’un fort esprit de prosélytisme pour réussir ; par le fait, l’église grecque compte peu de martyrs et n’a plus d’apôtres. Chez les Latins, au contraire, les saints, les martyrs et les confesseurs surabondent ; catholiques et protestants ont un système de missions qui embrasse la sphère terrestre tout entière.

Telles sont les conditions générales qu’aucune orthodoxie ne peut éviter ; la lutte, pour exister et pour s’étendre, est une double loi qui leur est imposée par leur propre nature, et à laquelle les communions religieuses ne peuvent se soustraire qu’en se dissolvant et en cessant d’être.

Il est une troisième sorte de lutte, plus intime et plus redoutable pour elles que les deux autres. Quand les deux premiers hommes se sont abouchés pour discuter sur une théorie religieuse, ils ont pu tomber d’accord sur tous les points et former une première communauté parfaitement unie. Ils ont pu de même être en désaccord sur quelque point, et il est évident qu’aucun