Page:Burnouf - La Science des religions.djvu/274

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est accommodée, soit que la société fût féodale, soit qu’elle changeât cet ancien état pour s’organiser en monarchies. Les princes de l’église trouvèrent à ce changement quelque avantage, puisque les premiers pairs qui devinrent rois ne pouvaient réussir qu’avec l’appui de l’église, déjà centralisée dans Rome. L’orthodoxie romaine fut quelque temps la puissance politique prépondérante, et jouit d’une autorité que l’union des pouvoirs entre les mains d’un seul étendait également sur les rois, les seigneurs et les peuples. Depuis lors, l’alliance a été en s’affaiblissant, parce que les rois, pour reconquérir leur indépendance, qu’ils avaient aliénée, furent obligés de s’appuyer sur le peuple, c’est-à-dire sur cette foule des profanes qui représente le principe de la liberté individuelle. La Réforme lui porta un second coup en détachant d’elle des populations entières. Le troisième coup lui fut porté par la révolution française.

L’alliance de la religion et de l’état, en prêtant à l’enseignement sacré et aux rites une force prépondérante, règle la durée des orthodoxies ; mais ces trois moyens de propagation se sont diversifiés selon les races, les peuples et les temps.

Dans l’Inde les parts de religion données aux hommes étaient inégales : les dogmes et les rites formaient un trésor dont les brâhmanes seuls avaient la clé ; ils en distribuaient à la caste royale une mesure assez grande pour assurer son alliance, et pour la maintenir dans son devoir vis-à-vis d’eux et dans sa supériorité à l’égard des autres castes. Ce que la caste des marchands et des laboureurs recevait de religion suffisait pour la maintenir au-dessus des malheureux çûdras dont le rôle était de servir, mais non pour l’égaler à ses supérieurs. Quant aux çûdras, ils n’avaient aucune part à la religion âryenne et demeuraient dans leurs grossières