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APPENDICE. — N° VIII.

« il a la supériorité du goût des saveurs ; » c’est du moins de cette manière que l’entendent les interprètes tibétains. L’orthographe barbare du Vocabulaire pentaglotte s’explique par la confusion qu’aura faite le copiste des deux lettres tibétaines pa et sa. Mais quelle confiance pourrait-on avoir en ce recueil, si l’on était uniquement réduit aux indications fautives dont il est rempli ? A. Rémusat traduit ainsi ce caractère, « salive de haut goût ; » ce qui donne un sens singulier et qu’il ne me paraît pas facile de comprendre. Les quatre listes de Ceylan, qui sont unanimes, peuvent s’accorder avec le sens tibétain, mais en substituant un autre terme ; en effet, le mot rasaggasaggi doit être en sanscrit rasagrasâgri, littéralement, » il a l’extrémité ou la supériorité de l’organe qui saisit les saveurs, » c’est-à-dire, il a le sens du goût excellent, » Le compilateur singhalais du Dharma pradîpikâ représente cet article par Rasagrâsa agra. Mais une des listes du Lakkhanasnttaie fait suivre d’une glose qui n’est pas parfaitement claire pour moi, et où il semble que le terme final, agga, conserve son sens physique, au lieu de prendre le sens figuré que lui attribuent les Tibétains. Voici cette glose : nddhaggassa rasaharaniyô givâya djâtâ hônti samabhivâhiniyô. Cela veut-il dire que les sécrétions qui saisissent et entraînent les saveurs, naissent chez lui à l’extrémité supérieure de la langue, au fond de la gorge même ? Cela est possible ; mais alors l’énoncé du caractère rasaggasaggî est d’une concision un peu obscure, car il signifie seulement, si aggî garde sa valeur physique, « il a l’extrémité de « ce qui perçoit les saveurs, » ou encore ; « il a une extrémité qui saisit les saveurs. » Quoiqu’il en soit de cette difficulté de détail, le résultat de cette glose pâlie ne nous éloigne pas sensiblement de celui dé la version tibétaine ; car un être assez heureusement doué pour percevoir les saveurs au delà du point où s’opère chez les autres hommes l’action du goût, a vraisemblablement le sens du goût excellent. C’est jusqu’ici la seule conciliation que j’aie pu trouver entre la version tibétaine et la glose pâlie.

12. Prabhâtatanudjihvah ; V13 prahhâtatanndjihvak ; Haà prabhâiadjihvaiâ ; Lc28, L27, Ma 6, D27 pahûtadjivhô. Ce caractère signifie, « Il a la langue large et mince ; » les Tibétains le traduisent, « il a îa langue longue et effilée. » Glough, dans son Dictionnaire singhalais, donne à l’énoncé pâli, pour lequel nos quatre listes sont unanimes, le sens que j’ai préféré. Les Buddhistes du Sud s’accordent ici encore avec ceux du Nord, sauf qu’ils suppriment l’épithète de tanu, « mince. »

13. Sim̃hahanuh ; V12 sim̃hahanu ; H26 sim̃hahanutâ ; Lc30, L22, M21, D22 sîhahanu. Ce caractère signifie, « Il a la mâchoire du lion ; » les Tibétains ne l’entendent pas autrement. Ici encore les Buddhistes de Ceylan-sont d’accord avec ceux du Népal. Le lion, considéré comme le symbole de la plus grande force physique parmi les animaux, donne, ainsi qu’on le verra, plus d’un caractère à cette énumération des perfections d’un homme supérieur. On sait que le grand-père de Çâkya se nommait Sim̃hahanu.

14. Susam̃vrĭtaskandhaḥ ; V15 supam̃vrĭttakandhaḥ ; H19 susam̃bhrĭtaskandhatâ ; Lc19, L20, M19, D20 samavattakkhandhô. Littéralement interprété, ce caractère signifierait,