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APPENDICE. — N° VIII.

posait A. Rémusat, « le dessous du pied plein et rempli[1], » n’est pas aussi éloignée de l’interprétation littérale qu’on pourrait le croire au premier coup d’œil ; elle veut dire qu’il n’y a pas de vide sous la plante de ses pieds ; or c’est exactement ce qu’on trouve dans la glose singhalaise du Dharma pradîpikâ qui accompagne le caractère qui nous occupe. Cette glose rapporte encore quelques textes pâlis en vers qu’on est vraisemblablement dans l’usage de citer à l’occasion de ce caractère ; je crois utile de les reproduire ici, quoique je ne puisse encore dire à quel ouvrage ils appartiennent.

Ninnam̃ ṭhânam̃ unnamati yatchtchhantê lôkànâyakê
Unnatañtcha samam hôli paṭhavîtcha atchêtanâ
Pâsânâ sakkharâtchêva kaṭhalâ khânukaṇṭhakâ
Sdbbê sammaggâ vidjdjanti gatckichhantê lôkanâyakê
Gaichtchhato Buddhasêtthassa hêṭṭhâ pâdatalam̃ muda
Samam̃ samphusatê bhûmim̃ radjasânupalimpati
Nâgavikkantavârô sô gamanê sôbhatî djinô
Pâram̃ gatchtchhati lôkaggô bhâsayantô sadêvakam̃
[2].

« Là où s’avance le chef du monde, les lieux bas se relèvent, et les endroits élevés deviennent unis, ainsi que la terre insensible. Les pierres, le gravier, le sable, les trous, « les endroits raboteux, tout devient un bon chemin, là où s’avance le chef du monde. « Quand marche le plus parfait des Buddhas, la plante de ses pieds qui est douce, est par « tous les points également en contact avec la terre, et n’est pas souillée par la poussière. « Avec le pas balancé d’un éléphant, le Djina brille par sa démarche ; le chef du monde « atteint l’autre rive, le remplissant de splendeur, ainsi que les Dêvas. » Ces vers expriment avec un peu de diffusion, l’idée indiquée par le trente-deuxième caractère de la liste du Lalita vistara, « La plante des pieds du Buddha est unie ; » et cette perfection recherchée est chez lui si grande, qu’elle se communique aux surfaces inégales qu’il vient à rencontrer dans sa marche.

Dans le cours des analyses qui précèdent, j’ai signalé les nombreuses ressemblances qui existent entre les sept listes des caractères distinctifs d’un grand homme. Ces ressemblances sont telles, et par leur nombre, et par la nature des signes sur lesquels elles portent, qu’on en doit hardiment conclure que toutes ces listes partent d’un fonds primitivement identique. Quant aux différences, elles ont été également indiquées, et l’on a dû apprécier combien peu elles sont importantes. Il en est cependant plusieurs sur lesquelles il est nécessaire de revenir, parce que voulant grouper autour de la liste du Lalita vistara tous les caractères analogues qui se trouvent dans les autres listes, je n’ai pu toujours indiquer comment était exprimé dans ces listes mêmes un caractère manquant au Lalita. Il faut donc donner ici en quelques mots le résumé de toute cette recherche, pour qu’on puisse mesurer d’un coup d’œil les ressemblances et les différences qu’on remarque dans les diverses autorités qui sont à ma disposition.

  1. Mélanges asiat. t. I, p. 170.
  2. Dharma pradîpikâ, f. 2 b et 3 a.