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Page:Burnouf - Lotus de la bonne loi.djvu/695

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APPENDICE. — N° IX.

monde par le lien des mauvaises actions ; qui, si ce n’est moi, pourra, par sa connaissance profonde du monde, affranchir l’homme de ce lien[1] ? » Et dans le Mahâgôvinda sutta : Iminâpag̃gêna samannâgatam̃ satthâram̃ nova atîtam̃sê samanupassâma na panêtarahi aññatra têna Bhagavati. « Nous ne voyons ni dans le passé, ni dans le présent, un maître doué de cet attribut, si ce n’est ce Bienheureux[2]. » Je pourrais multiplier les exemples qui prouvent le fréquent emploi de ce terme dans les textes pâlis ; j’aime mieux montrer qu’il n’est pas moins ordinaire dans le style des édits de Piyadasi, dont il importe d’établir l’analogie frappante avec la phraséologie buddhique des livres du Nord et du Sud.

Le premier exemple que je citerai est emprunté à la fin du sixième des édits de Girnar. Après avoir exprimé le vœu que ses descendants travaillent comme lui au bien du monde, Piyadasi ajoute ceci : Dukaram̃tu idam̃ añata agêna parâkamêna[3]. J. Prinsep et Wilson ont mêlé cette petite phrase avec ce qui précède, et il y a tout lieu de croire que le sens de añata, pour le pâli aññatra, leur aura échappé ici. Lassen qui a retraduit, et très-exactement, l’édit presque entier, ne s’y est pas trompé, et il a rendu ainsi la phrase : « Dieses ist schwierig zu thun ohne die vorzüglichste Anstrengung[4], » ou comme je propose de dire : « mais cela est difficile à faire, si ce n’est par un héroïsme supérieur. » Il n’y a ici d’autre point à signaler que l’orthographe de dukaram̃. Ce mot, qui revient au sanscrit duchkaram̃, serait mieux écrit avec un û long, dâkaram : on retrouverait dans l’allongement de la voyelle la compensation de la suppression du ch de duch-karam.

Le second exemple est emprunté à l’édit qui regarde le Nord sur le pilier de Delhi ; j’en vais reproduire intégralement le début à partir de la troisième ligne, parce que l’interprétation de Prinsep, outre qu’elle manque le sens de plusieurs termes, n’exprime pas bien la disposition relative des phrases commençant cette déclaration des principes moraux du roi Piyadasi. J’ai naturellement introduit dans ma transcription les bonnes corrections que fournissent la copie du major Pew et le fac-similé du capitaine Smith[5]. Après avoir annoncé que c’est dans la vingt-sixième année de son règne depuis son sacre que cet édit de la loi est gravé sur la colonne, ii continue ainsi : 3. hidatapâlatê dusam̃paṭipâdayê am̃nata agâyâ dhammakâmatâja | 4. agâya palikhâyâ agâya susûsâyâ. agêna bhayêna | 5. agêna usâhêna êsa ichakhô marna animathi yâ | 6. dham̃mâpêkhâ dham̃makâmatâtcha suvê suvê vaḍhitâ vaḍhisatitchavâ | 7. pulisâpitcha me ukasâtchâ gêm̃vayâtchâ madjhimâtchâ anuvidhiyam̃ti | 8. sam̃paṭipâdayam̃titchâ alam̃ tchapalam samâdapayitavê hêmêvâ am̃ta | 9. mahâmâtâpi êsa hi vidhi yâ iyam̃ dham̃mêna pâlanâ dham̃mêna vidhinê | 10. dham̃mêna sukhiyanâ dham̃mêna gôtîti[6]. Sans m’arrêter à discuter l’interprétation des Pandits de Calcutta, qui n’est ici que d’un faible secours, je passe immédiatement à celle que je crois

  1. Djina alamkâra, f. 19 a.
  2. Mahâgôvinda sutta, dans Dîgh. nik., f. 111 a et b.
  3. Prinsep, On the Edicts of Piyadasi, dans Journ. asiat. Soc. of Bengal, t. VII, p. 238 et 255 ; Journal roy. as. Soc. of Great-Britain, t. XII, p. 193 et 197.
  4. Lassen, Ind. Alterthumsk, t. II, p. 256, note 1.
  5. Prinsep, Further Elucid. of the Lâṭ, dans Journ. asiat. Soc. of Bengal, t. VI, p. 794 ; Reexamin. of the various Inscript. etc. ibid. p. 965 et pl. LVI.
  6. Prinsep, Interpret. of the most ancient of the Inscript. etc. dans Journ. asiat. Soc. of Bengal, t. VI, 2e part.  p. 577. Sauf les corrections fournies par la révision indiquée tout à l’heure, j’ai reproduit exactement le texte de Prinsep ; mais ce texte doit être