Page:Busoni - Chefs-d’œuvre poétiques des dames françaises, 1841.djvu/217

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Dans nos charmants hameaux, les lambris sont des hêtres.
On y vit sans sujets, mais on y vit sans maîtres.
C’est l’asyle des biens qu’on bannit à la cour,
Et c’est de plus, berger, le séjour de l’Amour.
Oui, vous quittez ce dieu, quittant la solitude ;
Il ne vous suivra pas parmi la multitude.
Malgré tous vos attraits, en vain vous l’espérez :
La Fortune et l’Amour ont leurs droits séparés :
Où l’une veut régner, il faut que l’autre cède.
Eh ! quelle est donc, hélas ! l’ardeur qui vous possède ?
Pourquoi vouloir quitter ce maître si charmant,
Qui vous rendit heureux presqu’aussitôt qu’amant ?
Ah ! revenez à moi, songez que je vous aime ;
Ou plutôt, Clidamis, revenez à vous-même.
De votre propre cœur, écoutez mieux la voix ;
Consultez-le, berger, pour la dernière fois.
Son amoureuse ardeur étoit trop peu commune.
Pour céder aux appas de l’aveugle Fortune ;
Il est né pour avoir un plus illustre appui,
Et le destin n’a point d’esclave tel que lui.

MADRIGAL.


Quand on voit deux amants d’esprit assez vulgaire,
Trouver dans leurs discours de quoi se satisfaire,
Et se parler incessamment,
Les beaux esprits, de langue bien disante,
Disent avec étonnement :
Que peut dire cette innocente ?
Et que répond ce sot amant ?
Taisez-vous, beaux esprits, votre erreur est extrême ;
Ils se disent cent fois tour à tour : Je vous aime.
En amour, c’est parler assez élégamment.